On dirait bien, hein ? Mais non. «La terre vue du sol», çà n’est pas le titre du nouveau livre du photographe médiatique et héliporté. Non non.
La terre vue du sol, c’est le joli titre choisi par les responsables de la SÉRAIL (Station d’Expérimentation Rhône-Alpes Information Légumes) pour le colloque organisé à Dardilly (69) en clôture des actions mises en place dans le cadre de «l’année internationale des sols». En effet 2015 avait été décrétée année internationale des sols par l’assemblée générale de l’ONU sous le titre «les sols sont en danger mais la dégradation n’est pas irréversible»
Les Biaux Jardiniers s’y sont rendus.
C’était passionnant, notamment grâce au compte rendu par Dominique Berry des essais «matière organique» qu’il a menés 15 années consécutives à la station.
C’était passionnant aussi grâce au géo-pédologue jurassien Yves Hérody. Après formation de géologue, ses travaux sur «les conditions d’apparition et de développement du vivant sur terre» le conduisent vers la pédologie dynamique. Il a créé le BRDA (Bureau de Recherches sur le Développement Agricole) après avoir travaillé à la remise en état des terres après conflit, et à l’installation définitive des personnes déplacées en zone rurale.
Sur la méthode Hérody et le Biau Jardin de Grannod, voir le travail que nous faisons avec Dominique Massenot.
Ce colloque était passionnant aussi par le magnifique mot d’accueil préparé par Luc Veyron, le maraîcher président de la Sérail. Les Biaux Jardiniers tiennent à le partager avec les visiteurs de ce site :
«Le sol, une école d’humilité»
« Le sol nous enseigne tout au long de notre carrière de maraîcher. Combien de fois notre sol nous ramène à sa réalité. Sentiment d’humilité pris au sens littéral de «près de la terre». Évènements parfois ressentis comme une humiliation, quand persuadé d’avoir fait pour le mieux, la terre nous rappelle à l’ordre. On se sent abaissé,…plus bas que terre ; démuni quand nous n’en comprenons pas les raisons.
Humilité, humiliation, humain, humus, tous ont la même racine latine : «humus» la terre. Notre humanité est modelée de cette terre. Au quotidien, nous faisons corps avec elle ; à nous de l’observer, de la sentir, de la comprendre, au final de la connaître.
On peut partir de rien, et faire ses propres expériences, réinventer l’eau tiède à chaque génération, au risque de perdre de précieuses années. On peut aussi chercher l’enseignement de personnes plus expérimentées, en acceptant avec humilité ses faiblesses. En quelques mots je vous livre les bases du compagnonnage cognitif :
- observer des savoirs-faire
- cerner les manières de raisonner les problèmes même si les approches sont empiriques
- se poser des questions
- rendre explicite
- se mettre dans la peau de celui qui fait pour gagner en autonomie
- et au final le faire soi-même.
Nous aussi, la station Sérail et les conseillers en développement, avons une mission de vulgarisation, au sens de répandre les connaissances dans un large public.. Une journée comme celle-ci, comme nos journées Portes Ouvertes en saison ont ces missions : transmettre, vulgariser du savoir
Ce sont des journées riches de contacts. Elles permettent de rompre l’isolement, de sortir la tête du guidon. Le temps que nous investissons dans ces échanges est parfois la clé nécessaire pour faire sauter certains verrous qui nous empêchent d’avancer.
La démarche de vous former, comme vous le faites aujourd’hui, demande d’admettre que l’on en sait peu sur cette terre ; d’accepter que cette terre vue du sol n’a pas fini de nous surprendre. Et que, quel que soit notre âge, notre formation initiale, se dire avec humilité que nous avons toujours à apprendre.»
Luc Veyron
président de la Sérail